La réparation ou la restauration ne sont pas qu’une histoire de technique et de technicien, j’ai même tendance à considérer que le goût est assez primordial pour la réussite d’un travail, et une photocopieuse n’est d’aucune utilité pour acquérir ce goût. Savoir comment étaient fabriqués les instruments, quels types de vernis étaient utilisés, combien de spires les micros comptaient est une chose et se trouve facilement sur internet; mais acquérir un juste dosage, un feeling, savoir se transposer dans une époque, comment et dans quelles conditions travaillaient les ouvriers, faire appel à son imagination, avoir une vision globale, utiliser les bon produits, les bonnes techniques, ne pas en faire trop et garder en tête que vous êtes censés faire un travail vieux de 35 années s’acquière plutôt discrètement sur le terrain que sur les forums.
Cette guitare a été achetée dans un sale état: plus de micro Bridge, et des autocollants sur le corps qui ont altéré le vernis, impossible de les ôter sans faire venir la teinte avec, ce que le nouveau propriétaire n’a pas pu s’empêcher de faire et c’est tant mieux car je n’aurais moi même pas osé, mais maintenant que le mal est fait et que les autocollants sont partis, il ne me reste plus qu’à tenter l’opération de la dernière chance et essayer de redonner un coup de crédibilité à cette belle Télécaster. Je commence par fabriquer un micro Bridge, avec aimants américains en alnico 5 bien bright et agressif comme cela caractérise les Télécaster de cette époque, aidée en cela par le corps en Frêne (plutôt batte de baseball que swamp) et le manche maple. Je ne vais pas détailler mes petits secrets de fabrication et les petits détails que j’ajoute lorsque je bobine un micro, mais je suis bien convaincu que ce sont ces petits détails qui jouent un grand rôle dans “l’esprit d’époque” qui caractérisent ces micros. La finition et la protection du bobinage se fait par un cordon noir caractéristique des années CBS. Ensuite, vient cette fameuse retouche de corps, là je ne vais faire aucun commentaire et vous laisser juger du résultat. Voilà, mission accomplie en ce qui me concerne, deux heures plus tard, le propriétaire de la guitare m’envoie ce petit mail:
“Salut Patrice, Je viens de tester la bête, c’est trooooop bon !!! On verra si la microphonie s’atténue un poil avec la wax, mais elle est juste parfaite, je te suis très sincèrement reconnaissant. Elle sonne “télécaster” à mort ! Ma reissue 52 a des soucis à se faire !
Bon week-end et mercibravochampiondumonde encore”
Avant:
Après:
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